mercredi 26 juin 2013

1148 : mardi 25 juin 2013


affleurement rectiligne d'un seuil de pierre. interruption de l'herbe. cordeau exact du dégoût. au-delà sablière jaune. vide raviné de grandes entailles cadastrales.

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La clé dans la porte a réveillé un souffle rauque de l’autre côté, puis un gémissement jappant accueille le couple plus moi. La femme a eu trois étages haussmanniens pour inventer : « tu te souviens, je t’avais parlé d’une stagiaire, et son petit ami violent… ». L’homme répond d’un petit « ha » et me dévisage comme un fait divers scabreux dans le journal. Il n’est pas bien grand, à peine plus haut que moi. Une petite soixantaine, cheveux gris en brosse, bien clairsemés au-dessus des tempes, assez svelte, chemise de satin gris. La femme semble un peu plus jeune, maquillage impeccable malgré l’heure tardive, elle a du aller se repoudrer le nez avant de quitter leur soirée.

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/ Nuit du 24 au 25 juin / Dans ce rêve, tu réalises un film, un long-métrage, œuvre colossale et citation de My Own Private Idaho de Gus Van Sant et dans le même temps, par effet de palimpseste, du drame Henri IV de William Shakespeare. La veille, nous parlions de ce film avec E. qui me demandait s'il « était bien ? » Je lui confiais l'avoir vu en deux temps. L'atmosphère pesante et angoissante de la dérive me renvoyait à ma propre errance, sans le sexe et la débauche certes - suis toujours et encore cette jeune fille trop sage. J'avais regardé une première moitié avant la nuit et coupé pour préserver mes songes déjà tourmentés. La pellicule n'était pas passée au filtre de l'onirisme. Je m'étais subséquemment attaquée à la seconde partie le lendemain, rassérénée de n'avoir pas souffert des effets captivants d'un nouveau cauchemar. Puis vient le moment - hier - où nous parlons du fameux film avec E. Je lui explique l'affaire. Nous ironisons sur la possibilité que mes prochains rêves puissent prendre le pli de cette conversation. C'est chose faite, puisque nous arrivons là au récit d'une vision nocturne étrange, pour ainsi dire hallucinée et extatique, celle de toi qui m'embrasses et parais m'aimer encore, ou à nouveau, comme un ami avec toutefois des marques de tendresse sexuelle, sans frontières, sans explications. Des images sibyllines, surannées, déjà passées, impossibles. L'appartement de tes parents, mémoire d'un souvenir d'amour adolescent, alors que la maison ne peut être qu’apparentée, alors que nous vivons toujours à leurs crochets, mais que nous nous demandons tout de même « ce soir, on dort chez toi ou chez moi ? », alors que le monde nous appartient et que tout pourrait se trouver plus aisé, mais ce n'était pas mon cas. Tu es là donc, me filmes, moi qui fais si mal l'actrice. J'occupe un rôle qui est le mien, ne comprends pas ce que tu désires, ne te reconnais pas, me souviens de Laurence Anyways et me dis que tu es devenu cet homme aux frontières du genre, cet homme dont je tombe à nouveau amoureuse, avec les prémisses des sentiments naissant, les frissons, la gêne et la nouveauté qui appâtent et attisent le désir. Nous renaissons.