mardi 12 avril 2011

515 : lundi 11 avril 2011

Réflexions marginales : me demander ce qui serait advenu si, plutôt que Léon, mon choix s’était porté sur Marcel…


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Les cours devaient faire de nous, s'ils étaient à la hauteur de leur coût, de fins, inventifs, parfaits cuisiniers, prêts à réjouir familles et surtout amis. Ils avaient lieu dans une vieille et noble maison. Nous nous retrouvions dans une grande salle aux boiseries rechampies de jaune paille et céladon, dallée assez classiquement de noir et blanc. Nous échangions sourires, quelques mots, de discrets regards classifiants, et nous étions introduits par une jeune femme souriante dans une immense cuisine donnant sur le jardin, d'un modernisme ébouriffant, d'une pureté fonctionnelle exemplaire. J'avais beau y mettre une bonne volonté appliquée, je faisais de mon petit espace une image assez parfaite d'un territoire désastré.


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Au début de leur histoire, il trouvait ses absences charmantes. Elle oubliait souvent la moitié des courses (elle oubliait souvent la liste), sa langue buttait sur des noms et son regard rencontrait parfois le vide et il lui semblait alors qu'elle s'illuminait de l’indicible. Aujourd'hui, il est pris d'une angoisse lorsqu'il découvre les ciseaux de cuisine dans le frigo et l'huile pour les gonds de portes à côté du dentifrice. Son visage ne rencontre plus la lumière, il s’éteint sur le vide comme si une connexion ne se faisait pas. Elle est en risque de court circuit permanent : il sait qu'elle ne regardera pas avant de traverser, qu'elle ne se souviendra pas du chemin du retour, de la date ou voire même de lui, son fidèle compagnon depuis trente-sept ans.