jeudi 24 mars 2011

496 : mercredi 23 mars 2011

Quand, le matin, il posait sur sa table de cuisine ses corn flakes Auchan, et que son regard, encore embrumé de sommeil, s'attardait sur le paquet de céréales où figurait une photo représentant la famille française idéale, soit une blonde souriante aux cheveux mi-longs, traits réguliers sans rien qui dépasse ou n’attire vraiment, un type châtain aux cheveux courts mais pas trop, l’air avenant dans un demi sourire, et que l’on devine cadre profitant d’un week-end bien mérité, et, bien entendu, les deux inévitables gosses, un gars une fille à qui ils ne manquent pas une seule dent bien qu’ils n’aient pas encore dépassé la dizaine, blondinets enjoués et se tenant droit, touche d’élan au milieu du couple serein et fier de sa progéniture, immanquablement Léon, renvoyé à la solitude et au désœuvrement béant de son célibat, sentait surgir dans les tréfonds de son être un indéfinissable sentiment de tristesse et d’abandon.


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C’était croire entendre un hurlement lointain et observer l’impassible espace ouvert sur les mêmes murs fermés et se dire qu’on avait, probablement, rêvé.


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Il ne sait jamais quelle charmante idiotie va sortir de sa bouche, et c'est bien ce qui lui plaisait quand elle avait 20 ans, une peau lisse et des seins rebondis. Aujourd'hui elle en a 45, ils font l'amour toutes les 2 semaines et il se prend à rêver d'une femme moins jolie mais dont il aurait le plaisir de la conversation.


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Et là tu n'auras d'autre choix que de continuer à chercher - te souvenir, trouver, inventer - un moyen d'y échapper à ce lieu sans nom ce terrain désolé. Du regard tu balayeras l'espace jusqu'à poser ton attention sur ce grand amas de pierres et de planches de bois, que l'on ne voit pas si on ne se concentre pas. De là tu suivras l'ombre portée, tu marcheras les yeux fermés parcourant de mémoire en longeant les anfractuosités du sol, en te fiant d'instinct aux senteurs dans l'atmosphère. Lorsque tu rouvriras les yeux, de minuscules perles de nacre scintilleront dans la terre noire. Le signe que tu attends. C'est à ce moment-là que tu sauras que tu es arrivé. Alors tu vivras une soudaine chute de tension, et puis, tu peineras à dormir, exténué, à l'écoute des vents lointains. Tu sauras oublier où tu te trouves ce que tu fais, de loin tu sauras retrouver en toi... Mais déjà ici on ne sait plus... ébloui ici la lumière l'aveugle. Patient, immobile, les yeux clos, il plisse le haut de son visage, il grimace, fronce les sourcils. Les fossettes se creusent, les muscles du cou ressortent imperceptibles, avec parfois ce léger sourire nerveux. Mais ce n'est rien. Stridentes les fréquences sourdent au loin. Les sirènes le perturbent à peine. Il s'enfonce, doucement en soi. S'enfonce dans son attention sa concentration. Un jeu de patience.