mardi 1 juin 2010

201 : lundi 31 mai 2010

Je suis passé près de chez elle, près de chez toi, pour la première fois depuis. C'est une rue, j'aimais déjà son nom en adjectif, que j'avais parcouru souvent bien avant de savoir qu'elle, que tu y étais déjà, sans savoir qu'elle, que tu existais, déjà belle et fragile, déjà douce et fine et délicate, déjà sensible et triste, forte sous la tristesse et vive et aimante, et belle encore et vivace parmi les précautions. Incertaine et résolue. Et sûrement déjà ces yeux qui débordent d'éclat quand pourtant ils se ferment à moitié pour sourire, comme si trop d'énergie, d'espoir et de joie sortait alors d'elle, de toi, que tu voudrais contenir pour te protéger, ou retenir contre toi pour mieux t'en irradier, mais qui se propagent et touchent au fond du monde autour, au fond de moi. C'était la première fois depuis, alors je n'ai pas pris sa rue, ta rue je ne l'ai pas prise. Je l'ai embrassée cette rue, un baiser dans ma main jeté dans la rue où elle était certainement chez elle, où tu étais chez toi certainement, puis j'ai contourné. J'ai préféré éviter le risque de la croiser malgré l'heure matinale, de te croiser même si tôt, de se croiser par hasard je craignais qu'alors ce ne soit pas bien, que se croiser par hasard ce soit mal se voir, quelques mots trop rapides échangés mal assurés, une situation qui peut-être aurait déjà été maladroite quoi qu'on fasse. Je veux bien la voir, bien te voir, pas autrement que bien.