mercredi 21 avril 2010

160 : mardi 20 avril 2010

On écoute dans une pièce obscure différents silences successifs et on les compare. Le silence d'un espace ouvert, le silence d'un espace clos. Le silence d'une seule personne, le silence de plusieurs personnes. Le silence de soi, le silence d'un autre. Le silence d'une pierre, le silence du vide. Le silence d'avant le bruit, le silence d'après. Le silence d'avant le silence, le silence d'après. Le silence des couleurs, le silence des cris. Le silence d'une bonne idée, le silence d'une mauvaise. Le silence du bruit, le silence du silence.

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Le maniement de l’engin peinturluré s’avéra savant mais le conducteur de l’imposante et ténébreuse automobile que j’avais entrepris de poursuivre menait un train de sénateur, me laissant le temps d’apprivoiser les commandes parfois récalcitrantes du deux roues. A l’inverse, c’est à un rythme effréné que les questions se bousculaient sous le casque, polychrome évidemment, dont je n’avais pas omis de coiffer mon crâne. Devant moi, je supposais une présence sur la banquette à côté d’Armelle. Mais quel genre de personne, dont elle ne m’eût jamais parlé, pouvait ainsi se déplacer à l’arrière de cette massive et mystérieuse voiture, se faisant mener par son chauffeur jusqu’à la sortie du lycée à l’heure même où Armelle en sortait ? Après de larges boulevards plantés d’arbres, nous parcourions maintenant des petites rues calmes bordées de maisons étroites à un, parfois deux étages. Il devenait de plus en plus difficile de préserver la discrétion de ma filature improvisée, difficulté aggravée par l’exubérance de mon véhicule. Je vis la berline ralentir aux abords d’un immeuble un peu plus grand que ses voisins, aux allures d’ancien presbytère. J’abandonnai précipitamment casque et scooter sur un trottoir étriqué pour m’approcher le plus furtivement possible du bâtiment. Je trouvai sous un porche en granit un observatoire convenable. Coincé entre les cumulus qui avaient peu à peu empli le ciel, un rayon de soleil éclaira le visage d’Armelle lorsqu’elle sortit de la voiture. Elle me parut transfigurée.